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Droit des aides d’Etat et lutte contre l’optimisation fiscale abusive des multinationales

Par François Gagnaire, consultant Aides d'Etat Conseil.
RÉSUMÉ : L’Union européenne ne dispose à ce jour d’aucun instrument de politique fiscale efficace et plus prosaïquement d’aucune politique commune en la matière. Certaines entreprises dont les fameuses GAFA usent et abusent de cette carence. Dans sa décision Starbucks, la Commission utilise le droit des aides d’Etat comme base juridique afin de sanctionner une optimisation fiscale préjudiciable aux finances publiques des Etats et dont certains esprits chagrins (?) considèrent qu’elle s’apparente à de la fraude fiscale. Ce n’est pas la première fois que la Commission utilise cet instrument juridique dans le contexte fiscal et cela est d’autant plus logique que le renoncement par les Etats à des ressources fiscales équivaut selon la règlementation et la jurisprudence en vigueur à une aide d’Etat en faveur des entreprises bénéficiaires de ce renoncement. Le modus operandi de la Commission est à la fois simple et efficace et « l’optimisation optimale » des entreprises en question n’y est pas étrangère. En effet, loin de contenter de sélectionner les pays d’Europe à plus faible fiscalité afin d’y implanter leurs sièges sociaux et d’y concevoir leurs prix de transfert, les entreprises incriminées pratiquent le ruling fiscal (traduit en APP/ Advice Price Agreement) qui leur permet de négocier pour plusieurs années des taux d’imposition encore plus avantageux, voire nuls. C’est à ce stade que la Commission peut intervenir via le droit des aides d’Etat en démontrant assez facilement que les ruling fiscaux en question s’apparentent à des dérogations non justifiées par l’économie des systèmes fiscaux de référence car discriminatoire au regard du traitement fiscal réservé à d’autres entreprises placées dans des situations juridiques et factuelles identiques face à l’impôt. Par ce raisonnement, l’avantage sélectif nécessaire à la qualification d’aide d’Etat est mis en évidence. La Commission européenne (l’Europe) si souvent taxée d’être complice de tous les maux de la mondialisation n’en est pourtant pas à son coup d’essai. Dépourvue d’instruments de politique industrielle, elle avait déjà et à toujours recours au droit des aides d’Etat afin de soutenir ou au contraire de sanctionner certains secteurs économiques. En dernier lieu, le système bancaire européen a bénéficié d’autorisations d’aides importantes (trop selon certains..) afin de traverser et se relever de la crise bancaire débutée en 2008. Cette décision Starbucks devrait s’accompagner d’autres sanctionnant les ruling fiscaux des grands groupes (la décision Apple Irlande vient d’être publiée au moment où nous écrivons ces lignes). Cependant, il restera à la Cour de justice de confirmer ou d’infirmer cette instrumentalisation du droit des aides dans un domaine où les Etats seuls ne peuvent se faire respecter. Quoi qu’il en soit et comme en témoigne en dernier lieu la victoire d’Apple au tribunal administratif de Paris face à Bercy qui souhaitait lui infliger un redressement fiscal de 1,1 milliard d’euros, la Commission est pour le coup bien plus efficace et inventive que les Etats en la matière.

Sélectivité d’une mesure fiscale non justifiée par l’économie du système fiscal de référence : la décision du 4/07/2016 sur la taxe « contribution santé » au secteur du tabac

Par François Gagnaire, consultant Aides d'Etat Conseil.
RÉSUMÉ : Les Etats ont toute liberté pour imposer des taxations diverses et variées à condition que ces dernières n’introduisent pas de discriminations favorisant certaines entreprises au détriment d’autres entreprises alors même que ces entreprises sont dans une situation factuelle et juridique identique face à la taxe. Ces taxations discriminatoires porteuses d’aides d’Etat ne sont justifiées ni par l’économie, ni par la nature du système de taxation en cause. En l’espèce la taxe sur le tabac imposée aux importateurs et négociants de tabac en faveur du système de santé hongrois est progressive et favorable aux petites entreprises. Or, cette progressivité n’est pas cohérente avec l’objectif sanitaire de la taxation. Elle n’est donc pas justifiée par la nature (la finalité) du système fiscal mise en place et s’apparente donc à une aide d’Etat.

Organismes intermédiaires et ressources d’origine étatique : la décision AMA du 7 avril 2016.

Par François Gagnaire, consultant Aides d'Etat Conseil.
RÉSUMÉ : Dans le contexte de la détermination de l’origine étatique d’une aide, la Commission est souvent confrontée à des « organismes intermédiaires » alimentés par des contributions obligatoires. Ces organismes agissent de manière plus ou moins indépendante de l’Etat auquel leurs ressources peuvent être ou non rattachées. Dans les célèbres affaires « Association Vent de colère » et « Doux élevage » de 2013, les critères permettant de qualifier les ressources d’un organisme intermédiaire d’étatique ont été définis. En l’espèce, les ressources de l’AMA seront bien considérées comme étant d’origine étatique.

Absence de transmission d’un avantage : la décision secteur laitier allemand du 4/04/2016.

Par François Gagnaire, consultant Aides d'Etat Conseil.
RÉSUMÉ : Le financement par l’Etat de certains contrôles phytosanitaires incombant aux entreprises du secteur agroalimentaire est en principe constitutif d’une aide d’Etat qui allège des coûts que l’entreprise devrait normalement supporter. Encore faut-il que les contrôles en question soient inhérents à la production et découlent d’obligations légales. Dans le cas contraire comme en l’espèce, le financement par l’Etat de ces opérations de contrôle ne confère aucun avantage aux entreprises et donc aucune aide d’Etat. L’Etat ne fait que compenser une charge supplémentaire non directement utile à la production ou à la prévention des risques sanitaires imposée aux entreprises.

Le Pari Passu et ses limites : la décision Duferco du 20 janvier  2016

Par François Gagnaire, consultant Aides d'Etat Conseil.
RÉSUMÉ : Le principe du pari passu permet à la Commission d’évaluer, dans le contexte de prises de participations dans une entreprise et plus largement dans le cadre du financement des risques, que l’intervention mixte d’opérateurs privés et de l’Etat est exempte d’aides d’Etat. Ce principe n’est autre que la déclinaison du critère de l’investisseur privé à une partie des opérations d’ingénierie financière auprès des entreprises. En l’espèce, le principe du pari passu qui veut que l’intervention concomitante de l’Etat et d’investisseurs privés s’effectue dans des conditions identiques avec les mêmes risques, les mêmes rémunérations et des montants comparables n’est pas respecté. L’investisseur privé n’est pas indépendant de l’entreprise aidée et les risques encourus par l’investisseur public sont bien plus importants que ceux supportés par le prétendu investisseur privé indépendant.

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